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Changements apportés aux taux d’imposition en Alberta
Le 18 juin 2015, au cours de sa première session législative, le nouveau gouvernement néo-démocrate de l’Alberta a déposé le projet de loi 2 intitulé An Act to Restore Fairness to Public Revenues. Ce projet de loi, qui a été adopté par la législature, majore les taux d’imposition tant des particuliers que des sociétés de la manière suivante :
- le taux général d’imposition des sociétés passe de 10 % à 12 % en date du 1er juillet 2015;
- le taux d’imposition des particuliers dont le revenu annuel est supérieur à 125 000 $ augmentera à partir du 1er octobre 2015.
Ces changements devraient se traduire par un apport de revenus additionnels pour le gouvernement de l’Alberta et les particuliers ainsi que les entreprises devront planifier leurs coûts supplémentaires liés à ces majorations. Les détails de ces changements sont présentés ci-dessous, suivis des aspects qu’il importe de prendre en considération dans la planification fiscale en raison des relèvements des taux d’imposition.
Taux d’imposition des sociétés
En date du 1er juillet 2015, le taux général d’imposition et le taux d’imposition des sociétés de fabrication et de transformation (F&T) de l’Alberta passent de 10 % à 12 %. Cependant, dans le cas des petites sociétés privées sous contrôle canadien (SPCC), le taux d’imposition des petites entreprises de l’Alberta est maintenu à 3 % du revenu imposable jusqu’à concurrence de 500 000 $ par année. Le tableau ci-dessous indique les nouveaux taux d’imposition des sociétés albertaines.
Taux d’imposition du revenu des sociétés |
Type d’impôt |
Alberta |
Taux combinés fédéral et Alberta |
|
Avant le 1er juill. 2015 |
À partir du 1er juill. 2015 |
2016 |
Avant le 1er juill. 2015 |
À partir du 1er juill. 2015 |
2016 |
Général |
10 % |
12 % |
12 % |
25 % |
27 % |
27 % |
F&T |
10 % |
12 % |
12 % |
25 % |
27 % |
27 % |
Petites entreprises [1] |
3 % |
3 % |
3 % |
14 % |
14 % |
13,5 %[2] |
Revenu de placements (y compris les impôts remboursables) |
10 % |
12 % |
12 % |
44,67 % |
46,67 % |
46,67 % |
[1] Le taux d’imposition des petites entreprises s’applique à la première tranche de 500 000 $ de revenu imposable des sociétés qui répondent à certains critères.
[2] Le budget fédéral 2015 a réduit le taux d’imposition des petites entreprises, qui passera de 11 % à 9 % en quatre ans, à partir du 1er janvier 2016. |
Les sociétés dont les années d’imposition chevauchent le 1er juillet 2015 seront assujetties à un taux d’imposition moyen pondéré. Par exemple, dans le cas d’une société dont l’année d’imposition s’étend du 1er janvier au 31 décembre 2015, le taux d’imposition pondéré des sociétés de l’Alberta s’élèvera à environ 11 %. Les sociétés ayant des fins d’exercice différentes seraient assujetties à des taux pondérés différents, selon les portions de l’année d’imposition antérieure et postérieure au 1er juillet 2015.
Bien que de nombreuses mesures aient été prises dans le passé relativement au régime fiscal peu élevé des sociétés de l’Alberta comparativement à celui des autres provinces, la majoration du taux général d’imposition et du taux d’imposition des entreprises de F&T fait passer l’Alberta du plus bas niveau au Canada à un niveau intermédiaire.
Fait intéressant, comme le taux d’imposition des petites entreprises de l’Alberta reste inchangé, cette province continuera d’avoir l’un des taux d’imposition des petites entreprises les plus élevés dans l’ouest du Canada, car la Colombie-Britannique, la Saskatchewan et le Manitoba ont tous des taux d’imposition des petites entreprises plus faibles. En fait, le taux d’imposition des petites entreprises au Manitoba est nul.
Le tableau ci-dessous indique comment les nouveaux taux d’imposition des sociétés de l’Alberta se compareront à ceux des autres provinces et territoires à compter du 1er juillet 2015 :
Province |
Général |
F&T |
Petites entreprises |
Nouvelle-Écosse |
16 % |
16 % |
3 % |
Île-du-Prince-Édouard |
16 % |
16 % |
4,5 % |
Yukon |
15 % |
2,5 % |
3 % |
Terre-Neuve-et-Labrador |
14 % |
5 % |
3 % |
Alberta |
12 % |
12 % |
3 % |
Manitoba |
12 % |
12 % |
0 % |
Nouveau-Brunswick |
12 % |
12 % |
4 % |
Nunavut |
12 % |
12 % |
4 % |
Saskatchewan |
12 % |
10 % |
2 % |
Québec |
11,9 % |
11,9 % |
8 % |
Territoires du Nord-Ouest |
11,5 % |
11,5 % |
4 % |
Ontario |
11,5 % |
10 % |
4,5 % |
Colombie-Britannique |
11 % |
11 % |
2,5 % |
Taux d’imposition des particuliers
À partir du 1er octobre 2015, l’Alberta mettra en œuvre un régime fiscal progressif semblable à celui de toutes les autres provinces et à celui du gouvernement fédéral. Comme les nouveaux taux d’imposition entreront en vigueur au milieu de l’année civile 2015, les taux d’imposition effectifs de 2015 augmenteront partiellement et le plein effet des majorations se fera sentir en 2016.
Le tableau ci-dessous illustre l’incidence de ces changements :
Revenu imposable |
2015 |
2016 |
De 0 $ à 125 000 $ |
10 % |
10 % |
De 125 001 $ à 150 000 $ |
10,5 % |
12 % |
De 150 001 $ à 200 000 $ |
10,75 % |
13 % |
De 200 001 $ à 300 000 $ |
11 % |
14 % |
Plus de 300 000 $ |
11,25 % |
15 % |
À partir de 2017, les fourchettes d’imposition de l’Alberta seront indexées en fonction de l’inflation.
Pour les différents types de revenus (indiqués ci-dessous), les taux d’imposition marginaux les plus élevés de l’Alberta seront les suivants :
|
Taux combinés fédéral et provincial |
Année d’imposition |
Revenu ordinaire |
Gains en capital |
Dividendes déterminés |
Dividendes non déterminés |
2015 |
40,25 % |
20,1 % |
21,0 % |
30,84 % |
2016 |
44,0 % |
22,0 % |
26,2 % |
35,72 % |
2017 |
44,0 % |
22,0 % |
26,2 % |
36,30 % |
2018 |
44,0 % |
22,0 % |
26,2 % |
36,76 % |
2019 |
44,0 % |
22,0 % |
26,2 % |
37,17 % |
Bien que le taux d’imposition marginal le plus élevé augmente de 5 % en Alberta et ne soit plus le plus bas au Canada, cette province restera l’un des territoires canadiens où les taux d’imposition marginaux sont les plus faibles.
Intégration des taux d’imposition
Les sociétés à capital fermé qui évalueront les avantages et les coûts associés au fait d’imposer le revenu de la société ou celui du particulier noteront qu’il sera plus coûteux d’imposer le revenu en passant par une société en raison des hausses de taux.
Taux général d’imposition des sociétés
À titre d’exemple, si on suppose qu’une tranche de 100 $ de revenus tirée d’une société exploitée activement est imposée dans cette société (au taux général d’imposition des sociétés) et que le montant après impôts est distribué aux actionnaires (au taux d’imposition marginal supérieur de l’Alberta), on obtient les résultats suivants :
|
2014 |
2015 |
2016 et années ultérieures |
Revenu de la société Moins : impôt de la société |
100,0 (25,0) |
100,0 (26,0) |
100,0 (27,0) |
Moins : impôt des particuliers sur les dividendes |
75,0 (14,5) |
74,0 (15,5) |
73,0 (19,1) |
Solde de la trésorerie après impôts |
60,5 |
58,5 |
53,9 |
Taux d’imposition pondéré effectif |
39,5 % |
41,5 % |
46,1 % |
Taux d’imposition marginal le plus élevé en Alberta sur le revenu gagné à titre de particulier |
39,0 % |
40,25 % |
44,0 % |
Désavantage à utiliser une société |
(0,5 %) |
(1,25 %) |
(2,1 %) |
Comme le montre ce tableau, avant les majorations des taux d’imposition, l’intégration des taux d’imposition des sociétés et des particuliers de l’Alberta dans le cas d’une société fermée était fiscalement presque neutre. À partir de 2015, cependant, le coût associé à l’imposition du revenu dans une société, suivie d’une distribution aux actionnaires, sera plus honéreux.
Dans le cas des entreprises de type propriétaire-exploitant, il peut être nécessaire de reconsidérer les stratégies en matière de salaire et de dividendes, tant sur le plan quantitatif que sur celui des dates de versement. Il faut toutefois souligner que les impôts des particuliers sur les dividendes ne sont exigibles que si les dividendes sont versés par une société à un particulier. À ce titre, la capacité de reporter les impôts des particuliers est presque inchangée.
Taux d’imposition des petites entreprises Dans le cas du revenu imposé au taux d’imposition des petites entreprises, l’Alberta n’a actuellement pas proposé de modifier le taux d’imposition des sociétés, et le budget fédéral de 2015 a amorcé une approche progressive pour abaisser le taux fédéral d’imposition des petites entreprises au cours des prochaines années. Cette mesure coïncide cependant avec une majoration (tant au fédéral qu’au provincial) du taux d’imposition des dividendes non déterminés. Par conséquent, même dans le cas du revenu assujetti à l’impôt au taux d’imposition des petites entreprises, le coût net, si on tient compte des impôts latents des particuliers sur les dividendes, devrait légèrement augmenter dans les années à venir.
Les propriétaires-exploitants auront donc intérêt à évaluer soigneusement la situation pour optimiser leurs résultats fiscaux.
Revenus de placements Dans le cas des revenus de placements, sous l’effet conjugué de la majoration des taux d’imposition des sociétés et des impôts des particuliers sur les dividendes non déterminés, il coûtera plus cher d’imposer les revenus de placements dans une société. Toutefois, contrairement au revenu tiré d’une entreprise exploitée activement, ce coût plus élevé aura un effet immédiat, car les impôts sur les revenus de placements ne peuvent généralement pas être reportés en retardant le versement de dividendes. Les revenus de placements imposés dans les SPCC sont en effet assujettis à un taux d’imposition remboursable plus élevé. Celui-ci est remboursé à la société à raison de 1 $ par tranche de 3 $ de dividendes imposables versés aux actionnaires.
En Alberta, comme les taux d’imposition des particuliers sur les dividendes sont historiquement inférieurs au ratio 3:1 indiqué plus haut, les sociétés ont généralement toujours versé des dividendes pour recouvrer l’impôt remboursable des sociétés.
D’ici à 2016, cependant, le taux d’imposition des particuliers sur les dividendes non déterminés sera supérieur au ratio 3:1. Par conséquent, les sociétés ayant des revenus de placements n’auront plus systématiquement recours au versement de dividendes pour recouvrer les impôts remboursables, car il se peut que les impôts additionnels des particuliers dépassent le montant du remboursement touché par la société. Une planification minutieuse sera nécessaire pour obtenir des résultats fiscaux optimaux.
Aspects à considérer dans la planification fiscale
Il y a trois principaux aspects à considérer à l’égard des majorations des taux d’imposition en Alberta :
• |
Date de comptabilisation du revenu/des déductions d’impôt – bien que les taux d’imposition augmentent partiellement en 2015, l’incidence des majorations sera surtout ressentie en 2016. Aussi est-il important que les contribuables tiennent compte dans leurs scénarios de planification de la date à laquelle ils constateront le revenu. Par exemple, serait-il plus avantageux de verser des dividendes ou des bonis le 31 décembre 2015 ou le 1er janvier 2016? De même, dans le cas où les contribuables ont la latitude de décider du moment où ils se prévaudront d’une déduction (p. ex., une cotisation REER), ils devraient tenir compte du fait qu’il sera plus avantageux d’effectuer une déduction en 2016 qu’en 2015. |
• |
Revenus de placements – compte tenu des changements apportés aux taux d’imposition, les contribuables ayant des placements dans des sociétés font face à une nouvelle donne par rapport aux décisions de planification fiscale traditionnelles. Premièrement, la date de versement des dividendes provenant d’une société ayant des placements est déterminante, car l’incidence fiscale pourrait être importante. Deuxièmement, au cours des années à venir, la planification fiscale des placements donnera lieu à des décisions très différentes de ce qu’elles ont été dans le passé. Il est plus important que jamais d’effectuer tôt sa planification fiscale. |
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Sociétés à capital fermé – les nouveaux taux d’imposition présentent un certain nombre de possibilités de planification (et d’écueils à éviter) en ce qui concerne les sociétés à capital fermé et leurs actionnaires. Par exemple, quelle stratégie convient-il d’adopter en matière de bonis ou de dividendes? Est-il encore avantageux d’imposer d’abord le revenu dans une société ou serait-il bon d’augmenter les bonis? Y a-t-il des avantages à saisir en ce qui concerne la planification familiale et la structure de propriété? Pour répondre rapidement à ces questions, disons qu’une planification proactive s’impose. |
Les changements apportés aux taux d’imposition offrent certaines possibilités, tant aux sociétés qu’aux particuliers, et nous serions heureux d’en discuter en détail avec vous.
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