Canada | Fiscalité | Le 30 septembre 2015
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Changements en matière de planification successorale

En décembre 2014, le gouvernement a adopté des modifications aux règles de l’impôt sur le revenu relatives aux successions et aux dons testamentaires afin de s’attaquer à des mesures de planification fiscale que le ministère des Finances jugeait abusives. Toutefois, tout en s’en prenant à ces mesures, les modifications législatives ont des conséquences qui dépassent largement la portée des questions qui avaient été soulevées par le ministère des Finances lors de ses consultations initiales. De fait, il s’agit des changements les plus fondamentaux en matière de planification successorale des 20 dernières années.

Dans le présent bulletin, nous donnons un aperçu des règles qui s’appliquent jusqu’au 31 décembre 2015, des modifications apportées à ces règles et de quelques-unes des plus importantes questions que vous pourriez avoir à régler dans le cadre de votre planification successorale. Nous illustrons aussi certaines conséquences que pourraient avoir ces règles au moyen d’un exemple. Cet aperçu général ne prétend pas fournir une analyse détaillée de toutes les modifications.

Règles en vigueur jusqu’au 31 décembre 2015

Au décès d’une personne, une succession est habituellement créée et administrée par les liquidateurs ou exécuteurs testamentaires. Dans le cadre de la succession du défunt, le testament peut aussi créer des fiducies testamentaires. Le type le plus courant de fiducie testamentaire est la fiducie au profit du conjoint. Toute fiducie testamentaire est admissible à l’imposition à taux progressifs (sans crédits d’impôt personnels) sur son revenu. Si un testament crée plusieurs fiducies testamentaires, il est possible d’utiliser l’imposition à taux progressifs à plusieurs reprises. D’autres avantages plus modestes sont associés à la fiducie testamentaire d’aujourd’hui, comme la possibilité d’avoir une date de fin d’exercice autre que le 31 décembre.

L’avantage associé à l’imposition à taux progressifs varie selon la province, mais il peut être considérable. Pour chaque fiducie testamentaire dont le revenu ne provenant pas de dividendes se chiffre à 100 000 $, l’avantage s’élève, par exemple, à 17 800 $ en Ontario, à 9 600 $ en Alberta et à 16 700 $ en Nouvelle Écosse.

De plus, lorsque décède le conjoint qui est le bénéficiaire d’une fiducie au profit du conjoint, les actifs de la fiducie sont réputés être vendus à la juste valeur marchande à ce moment. Le gain est inscrit dans la déclaration de la fiducie et l’impôt calculé dans cette déclaration est payé par la fiducie. Les actifs sont ensuite distribués aux bénéficiaires ultimes de la fiducie (p. ex. les enfants ou les petits-enfants). Dans cette situation, le recours à l’imposition à taux progressifs peut grandement contribuer à maintenir le taux d’imposition bas.

Enfin, lorsqu’un contribuable fait des dons de bienfaisance dans un testament, ces dons sont généralement considérés être faits au moment du décès de la personne et le montant des dons correspond à la juste valeur marchande du bien donné à la date du décès. Auparavant, aux termes d’une politique administrative de l’Agence du revenu du Canada, un don testamentaire d’une personne pouvait être déclaré comme un don de bienfaisance dans la déclaration du conjoint, l’année du décès de cette personne. Cette politique donnait une plus grande souplesse dans l’utilisation des dons dans certaines circonstances, car le conjoint pouvait demander un crédit pour dons cette année-là ou dans les cinq années subséquentes.

Les règles après le 31 décembre 2015

Les nouvelles règles entrent en vigueur le 1er janvier 2016. La modification la plus importante est celle concernant l’introduction de la succession assujettie à l’imposition à taux progressifs (« succession assujettie à l’ITP »), dont les principales caractéristiques sont les suivantes :

  • La succession assujettie à l’ITP est une succession qui a commencé à exister au décès et non une fiducie qui a été créée par le testament d’une personne. La distinction peut être difficile à saisir étant donné que dans le passé on ne les différenciait pas, et ces deux situations étaient traitées de la même façon.
  • Il ne doit pas s’être écoulé plus de 36 mois depuis le décès.
  • La succession doit satisfaire aux conditions d’une fiducie testamentaire aux fins de l’impôt sur le revenu. Certaines mesures prises après le décès d’une personne peuvent faire en sorte qu’une fiducie testamentaire cesse d’y répondre.
  • La succession doit elle-même se désigner comme succession assujettie à l’ITP dans la première déclaration produite après le 1er janvier 2016.
  • Aucune autre succession ne peut se désigner elle-même comme une succession assujettie à l’ITP de la personne après le 1er janvier 2016.
  • Il faut fournir le numéro d’assurance sociale du défunt dans la déclaration de la succession assujettie à l’ITP pour toutes les années.

Dans l’avenir, certains avantages fiscaux ne pourront être utilisés que par une succession assujettie à l’ITP. Les plus courants sont les suivants :

  • utilisation de l’imposition à taux progressifs sur le revenu gagné par la succession assujettie à l’ITP;
  • possibilité d’avoir une date de fin d’exercice autre que le 31 décembre;
  • possibilité de reporter rétrospectivement les pertes en capital subies durant la première année de la succession dans la déclaration finale du défunt;
  • avantage de n’avoir aucun acompte provisionnel à verser trimestriellement.

De très importantes modifications ont aussi été apportées aux règles qui s’appliqueront à certaines successions et fiducies, règles que l’on rencontrera surtout lorsqu’il existe une fiducie au profit du conjoint. À compter du 1er janvier 2016, au décès d’un conjoint qui était le bénéficiaire d’une fiducie au profit du conjoint, la même vente réputée de l’ensemble des actifs à la juste valeur marchande sera considérée avoir eu lieu de la même façon que selon les règles en vigueur avant le 1er janvier 2016. Toutefois, aux termes des nouvelles règles, le revenu sera inscrit dans la déclaration de revenus finale du conjoint, ce qui donnera lieu à un impôt à payer.

Enfin, des modifications ont été apportées aux règles relatives aux dons de bienfaisance prévus dans le testament. À l’avenir, les dons seront traités de la manière suivante :

  • Un don sera considéré être fait au moment du transfert du bien à l’organisme de bienfaisance. Cela signifie que le don sera fait par la succession ou une fiducie créée par le testament. Il en sera de même dans le cas d’un transfert d’actifs à partir d’une police d’assurance-vie, d’un REER et d’autres comptes semblables.
  • Le montant du don correspondra à la juste valeur marchande du bien au moment où il est transféré à l’organisme de bienfaisance.
  • Si la succession ou la fiducie n’est pas une succession assujettie à l’ITP, le crédit pour dons pourra être demandé uniquement par la succession ou la fiducie l’année au cours de laquelle le don aura été fait ou pour l’une des cinq années suivantes.
  • Une grande souplesse sera accordée à la succession assujettie à l’ITP en ce qui a trait au crédit pour dons de bienfaisance. En effet, la succession pourra choisir de demander le crédit pour dons dans la déclaration de revenus finale du défunt ou l’année précédente. Alternativement, le crédit pour dons pourra être demandé par la succession pour son compte dans l’année d’imposition de la succession, dans l’année d’imposition précédente de la succession, ou dans les cinq années d’imposition suivantes de la succession. Le crédit d’impôt pour dons ne pourra être demandé par le conjoint du défunt.

Questions soulevées par les nouvelles règles

Les modifications des règles soulèvent beaucoup de questions qui doivent être examinées dans le cadre d’une planification successorale. Le présent bulletin ne les aborde pas toutes, mais présente quelques-unes des plus importantes ci-dessous :

  1. La définition d’une succession assujettie à l’ITP soulève la question de savoir quelle succession peut être considérée comme une succession assujettie à l’ITP.
  2. Dans certaines provinces, les propriétaires d’entreprises privées ont couramment plusieurs testaments. Il conviendra de consulter un avocat dans les situations où les nouvelles règles doivent s’appliquer à plusieurs testaments. Si deux successions peuvent être désignées comme une succession assujettie à l’ITP, les liquidateurs ou exécuteurs devront s’entendre sur le choix à faire.
  3. Les nouvelles règles s’appliquent à compter du 1er janvier 2016 à toutes les successions. Si la succession existe actuellement, elle peut être considérée comme une succession assujettie à l’ITP, mais uniquement pendant 36 mois au total. Par conséquent, toute succession existante qui a été créée avant le 1er janvier 2013 ne peut pas être assujettie à l’ITP.
  4. Étant donné qu’aucune disposition de droits acquis ne s’applique à l’égard des successions existantes, les modifications pourraient entraîner des conséquences fiscales négatives. Puisqu’il est difficile (ou impossible) de revoir la structure d’une succession existante, certaines conséquences négatives sont inévitables.
  5. La date de fin d’exercice des successions ou des fiducies existantes qui ne peuvent pas être assujetties à l’ITP devra être le 31 décembre 2015. Par exemple, si la date de fin d’exercice d’une fiducie testamentaire existante était le 30 avril, la fiducie a eu sa fin d’exercice habituelle le 30 avril 2015 et elle aura une fin d’exercice additionnelle le 31 décembre 2015.
  6. Quand il existe plusieurs fiducies testamentaires, une seule peut être assujettie à l’ITP.
  7. Si votre succession prévoit créer une perte en capital la première année qui sera reportée rétrospectivement dans la déclaration de revenus finale du défunt, il faudra examiner attentivement les dispositions existantes du testament afin de s’assurer que la perte en capital sera créée dans la succession assujettie à l’ITP.
  8. Si la planification successorale prévoit la création d’une fiducie au profit du conjoint, il faudra examiner attentivement les répercussions qu’aura le changement quant au particulier qui doit payer l’impôt sur la vente réputée des actifs, comme nous l’expliquons plus en détail dans la partie suivante. Cette question est particulièrement importante lorsque les bénéficiaires ultimes de la fiducie au profit du conjoint ne sont pas les mêmes que les bénéficiaires de la succession du conjoint, une situation courante surtout lorsqu’il y a eu un second mariage.
  9. Toute planification successorale qui prévoit des dons de bienfaisance devra être revue afin de garantir que le crédit pour dons de bienfaisance sera disponible dans la même déclaration que celle où des impôts sont exigibles.

Il conviendra de passer en revue chaque situation avec soin afin de déterminer les conséquences possibles et les changements requis.

Exemple

Voici un exemple des problèmes potentiels qui pourraient découler des modifications apportées aux règles. Supposons les faits suivants :

  1. Taux d’imposition de 45 %.
  2. M. Tremblay est décédé en 2005. Les principaux éléments de son testament sont les suivants :
    • Ses actifs doivent être détenus dans une fiducie testamentaire au profit du conjoint.
    • Au décès de sa conjointe, les actifs doivent être divisés de la façon suivante : 15 % de leur valeur avant impôt est donnée à un organisme de bienfaisance et le reste est séparé entre les deux enfants de M. Tremblay.
  3. Mme Tremblay décède en 2017. Les principaux éléments de son testament sont les suivants :
    • Les actifs détenus par Mme Tremblay sont transférés à ses trois enfants à raison d’un tiers par enfant. Les enfants ne sont pas les mêmes que ceux de M. Tremblay.
  4. La valeur des actifs détenus par Mme Tremblay s’élève à 4 500 000 $ lesquels ont un gain accumulé de 1 000 000 $.
  5. La valeur des actifs détenus dans la fiducie au profit du conjoint s’élève à 6 000 000 $ lesquels ont un gain accumulé de 2 500 000 $.

Comparaison des résultats selon les anciennes et les nouvelles règles.

  Anciennes règles Nouvelles règles
Revenu imposable de la fiducie au profit du conjoint 1 250 000 $ Nul
Impôt exigible de la fiducie au profit du conjoint avant les crédits pour dons 562 500 Nul
Donation tax credit (45% of 15% of value of spousal trust) - Note (405,000) Nul
Impôt exigible 157,500 $ Nul
Crédit d’impôt pour excédent des dons Nul 405 000 $
Distribution de la fiducie au profit du conjoint
  • Organisme de bienfaisance – Note
  • Enfants de M. Tremblay

900 000
4,942,500

4 942 500
5 100 000
     
Revenu imposable de Mme Tremblay 500 000 1 750 000
Impôt exigible de Mme Tremblay 500 000 1 750 000
Impôt exigible de Mme Tremblay 225 000 787 500
Distribution de la succession de Mme Tremblay
  • Enfants de Mme Tremblay

4 275 000

3 712 500

Note : Il y a plusieurs éléments à prendre en considération pour déterminer si le crédit pour dons peut être utilisé par la fiducie au profit du conjoint. Pour les besoins de notre exemple, nous avons supposé que toutes les conditions étaient remplies pour qu’il le soit.

Comme le démontre l’exemple, les modifications des règles ont eu pour effet de déplacer de manière significative le fardeau fiscal et, par conséquent, la distribution des actifs.

  • Il y aurait une augmentation de 157 500 $ du montant à répartir entre les deux enfants de M. Tremblay (étant donné qu’il n’y a pas d’impôt dans la fiducie au profit du conjoint).
  • Il y aurait une diminution de 562 500 $ du montant à répartir entre les trois enfants de Mme Tremblay (étant donné que l’impôt de la fiducie au profit du conjoint est transféré à la succession de Mme Tremblay et que le crédit pour dons ne peut pas être utilisé par la succession).

Dans cet exemple, puisque M. Tremblay est déjà décédé, aucun changement n’aurait pu être apporté à sa planification successorale. En outre, comme les nouvelles règles ne comprennent aucune disposition sur les droits acquis, il semble impossible d’éviter les conséquences négatives.

Conclusion

Comme nous l’avons mentionné, les modifications ont une très grande portée et leurs répercussions sur les successions peuvent être considérables. Dans certains cas, on constatera des conséquences négatives sur les successions déjà en place qui peuvent difficilement être modifiées. Nous suggérons habituellement que les testaments soient revus tous les cinq ans ou lorsqu’un changement important survient dans la situation personnelle. Les modifications apportées aux règles devraient être considérées comme un changement important donnant lieu à une revue des planifications successorales et des testaments.

Si vous avez des questions concernant ces modifications, n’hésitez pas à communiquer avec votre conseiller de Deloitte.

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